Un dépliant touristique des Enfers

I- Le contexte pédagogique

Ce travail a été proposé à une classe de 6ème de 28 élèves très hétérogène. Si certains élèves maîtrisent totalement les compétences de lecture et d’expression, d’autres souffrent de lacunes très importantes. La lecture est au stade du déchiffrage pour certains, la découverte des textes est donc pour eux lente et fastidieuse. A ce rejet de la posture de lecteur s’adjoint un manque de culture qui accentue encore cette réticence : toute activité à caractère littéraire voire intellectuelle leur semble trop éloignée de leur potentiel. Ce découragement se produit très tôt dans leur scolarité et accroît le clivage qui les sépare des excellents élèves.

Mon but est donc de trouver une activité dans laquelle tous les élèves peuvent s’investir tout en trouvant une motivation intellectuelle et culturelle.

Lors d’une séance consacrée aux héros antiques, le passage rituel de la descente aux Enfers semble les fasciner. Les questions affluent afin de comprendre ce qui caractérise cet univers particulier au monde antique et ce sont justement les différences entre monde antique et clichés contemporains qui séduisent le plus. Les élèves les plus en difficulté se montrent particulièrement curieux.

Le thème des Enfers dans la mythologie gréco-romaine me semble porteur pour soutenir leur intérêt culturel. Afin de lever les difficultés de lecture, je propose des recherches via internet, support qui les motive et qui leur permet de travailler à une lecture sélective de l’information.

Afin de vérifier cette lecture, je propose un travail d’écriture mais qui s’éloigne des travaux d’écriture habituels. Ils devront composer un dépliant  touristique permettant à un touriste de notre époque de visiter les Enfers antiques. La production d’un document appartenant au monde extra scolaire permet de vérifier également leurs compétences du socle commun : est-ce que tous les élèves sont capables de transposer les connaissances acquises en cours ?
 

II- La mise en œuvre

Premier travail de recherche : choix des éléments caractéristiques des Enfers et description

Première étape:

Une maquette du dépliant touristique est donnée et expliquée aux élèves. Ils doivent ainsi composer six colonnes. Quatre seront particulièrement développées et présenteront les éléments sélectionnés. La première et la dernière serviront de recto-verso au dépliant finalisé et seront traitées ultérieurement pour un travail de mise en page et de présentation.

Une carte des Enfers est présentée et commentée en classe afin que les élèves comprennent qu’il s’agit d’une géographie qui se veut réelle pour l’époque antique. Les lieux présentés par les élèves sont donc induits par cette carte. Celle-ci est déposée sur le réseau et sera insérée dans le dépliant final.

Les élèves sont ainsi contraints de s’attaquer à la sélection d’éléments. Ce travail est mené en salle informatique et encadré soit par le professeur de français, soit par le professeur d’histoire-géographie, l’antiquité figurant aux programmes de nos disciplines respectives. Certains s’aperçoivent vite que le sujet « enfers » est bien trop vaste sur internet. Ils doivent rapidement affiner leur recherche et préciser leurs mots clefs. Second écueil, certains sites, même s’ils sont au départ très attractifs, mêlent de façon fantaisiste de nombreuses références sur cet univers mais sans distinguer les cultures concernées par ces emprunts. Une réelle lecture s’impose pour trier les informations et sélectionner les éléments adaptés à l’univers gréco-romain. Plusieurs élèves rejettent également rapidement les sites assez spécialisés utilisant un vocabulaire très spécifique et dont le registre de langue est trop soutenu. La question de la sélection juste de l’information met en jeu de réelles compétences de lecture.

La possibilité de choisir les éléments sélectionnés permet pour certains élèves de pallier leurs lacunes : ils ne sont pas tenus de présenter ce qu’ils ne comprennent pas. Ce choix par défaut induit une stratégie intéressante de lecture : conscients de leurs difficultés, ils essaient de la gérer au mieux, mettant en avant leurs points forts, s’auto – évaluant de façon plus rigoureuse que je ne l’avais espéré.

La reformulation des informations est induite par le sujet lui-même : dans la mesure où il s’agit d’un travail publicitaire, la prise en compte du destinataire est obligatoire. Cela évite l’écueil désagréable du copier-coller et permet à chaque élève d’apporter une tonalité plus personnelle : beaucoup d’humour pour certains, un soin très esthétique pour d’autres, une fascination pour les monstres pour d’autres encore. La qualité de cette reformulation permet de plus de vérifier leurs compétences en lecture et en maîtrise de la langue. En effet, tous ont pris en compte l’adresse au destinataire dans des phrases injonctives et ont utilisé l’impératif, le conditionnel et le futur à la 2ème personne du pluriel de façon spontanée. Même s’ils restent souvent implicites, les liens cause-conséquences sont utilisés avec efficacité et mettent en avant un discours qui passe souvent du descriptif à un début d’argumentatif.

Beaucoup choisissent la répartition des thèmes suggérés dans les colonnes. Toutefois, certains élèves ont envie de personnaliser davantage leur travail. Certains sujets les ont séduits au gré de leurs recherches et ils proposent alors une répartition différente plus personnelle. Pouvoir s’investir au maximum de ses capacités est une des plus values de cette activité : les très bons élèves se montrent aussi motivés que les plus en difficulté ce qui permet de gérer au mieux l’hétérogénéité de la classe.

Consignes données : 

Deuxième étape : choix des images et mise en page finale

La finalisation du dépliant, si elle présente un côté attractif et ludique pour les élèves, n’en reste pas moins indispensable d’un point de vue pédagogique. La prise en compte du dépliant comme outil de communication est mise en avant, la satisfaction de l’élève face au travail rendu est constructive. Leurs choix deviennent plus homogènes, les trames de fond unifient l’ensemble, les images se font écho : ils peuvent être fiers de leur travail très personnel et ainsi prendre confiance en eux.

Exemples de réalisation :

III- Pourquoi utiliser le numérique ?

Le numérique est utilisé à plusieurs niveaux pour la réalisation de ce travail :

Les ressources d’Internet servent à effectuer toutes les recherches préalables : informations générales, texte qui sera par la suite reformulé, images.

L’utilisation du réseau permet de regrouper les différentes données sélectionnées par les élèves ainsi que leurs différentes étapes de travail. Les élèves peuvent être alors suivis soit par le professeur de français, soit par le professeur d’histoire-géographie.

Le travail de traitement du texte et de l’image est également indispensable. Accompli dès la sixième, cette habitude permet de gommer certaines inégalités entre les élèves. Une réflexion sur la communication écrite est également engagée : comment rendre plus attractif son message grâce à l’outil informatique.

De nombreux outils permettant de corriger la langue sont laissés à disposition des élèves : dictionnaires en ligne dont dictionnaire de synonyme, conjugueur.
 

IV- Valider le socle commun

Domaine 1 : les langages pour penser et communiquer

- Comprendre, s'exprimer en utilisant la langue française à l’écrit

Domaine 2 : les méthodes et outils pour apprendre

- Organisation du travail personnel

- Coopération et réalisation de projets

- Médias, démarches de recherche et de traitement de l'information

Domaine 3 : la formation de la personne et du citoyen

- Réflexion et discernement

- Responsabilité, sens de l'engagement et de l'initiative

Domaine 5 : les représentations du monde et l'activité humaine

- Invention, élaboration, production
 

Angélique VOISIN

Collège Claude Debussy, La Guerche sur l'Aubois